Le milieu du développement collectif est dévasté ce printemps.
Mais il ne rend pas les armes.
Regards sur les formes de résistance en région.
Est-ce qu’on assistera à l’émergence d’un nouveau modèle de développement collectif ? Au Forum organisé par le TIESS, (Développer ensemble nos territoires) le 14 mai à Nicolet, plusieurs croyaient que les anciens et les nouveaux acteurs du DC, dont ceux regroupés dans le mouvement Touche pas à mes régions, reprenaient le même flambeau qu’ils brandissaient dans les années 80 avant que l’État ne développe sa vision du développement régional. Actuellement, des OBNL surgissent pour remplacer les instances éliminées et maintenir la concertation. Suite au choc, des organismes résistent aux coupures et réaménagent leurs effectifs avec d’autres. Les préfets de MRC et les maires prennent la mesure des dé- fis devant eux pour muter en vrais gouvernements de proximité. Comment pourront-ils le faire avec moins de ressources et d’expertise ? Comment remplacer tous ces perdants de la loi 28 — dont Solidarité rurale du Québec ? Seront-ils à la hauteur ? Certains croient que oui. D’autres attendent de voir si les budgets seront au rendezvous. Mais partout règne la confusion. On aurait tellement pu faire autrement…
Lorsque l’austérité met la concertation à l’index, le flambeau des collectivités vacille, mais trouve preneur. La force des ondes de choc et de l’indignation mises en lumière dans le dernier numéro de Kaléidoscope, restent bien d’actualité. Certains acteurs locaux et nationaux préfèrent se taire pour passer sous le radar des coupures aveugles. Parce que les premiers constats sont affligeants: la concertation a été sacrifiée sur l’autel de l’optimisation. Des annonces incroyables ont été confirmées. Des projets structurants abolis comme les Forums jeunesse, des missions réduites à des actions de courte vue, comme du soutien aux chômeurs. L’austérité a déjà fait plusieurs victimes : des organismes ferment. Leur disparition créera un trou béant, comme Portes ouvertes sur le lac pour l’accueil des immigrants dans la ré- gion de Saguenay-Lac-SaintJean. La perte de l’expertise est un fait avéré. Des milliers d’hommes et de femmes sont forcés de se réorienter. L’imposition de la logique « de moins d’État » laisse plusieurs communautés à elles-mêmes. On craint le retour du développement en silos, des guerres de clocher, de l’augmentation de la pauvreté des femmes, les grandes victimes de l’austérité… Le bien commun en prend pour son rhume. Mais tout n’est pas un champ de ruines. De nouvelles pistes d’action émergent. L’imagination revient en force et ce dossier en témoigne. Toutefois, la diversité des contextes installe une tendance de fond: l’augmentation des inégalités régionales, économiques, sociales.
Lorsque l’austérité met la concertation à l’index, le flambeau des collectivités vacille, mais trouve preneur.
Quelles sont les limites de ce grand retournement? Notre dossier soulève bien des questions, les réponses viendront avec le temps. Les effets sur les populations et sur certains secteurs d’activités sont prévisibles et désastreux.
L’élimination des commissions scolaires, justifiée au nom du déficit de participation électorale, n’a pas le même impact en régions que dans les grandes villes. Et force est de constater que la promotion et la prévention en santé n’ont plus la cote et il y aura un prix à payer à plus long terme, en santé publique. Auront-nous vraiment fait des économies au bout du compte ?
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SOURCE: Kaléidoscope
Journaliste indépendante, Ariane Émond a touché à tous les aspects de la communication. Elle a collaboré au Devoir, à Alternatives, à La Gazette des femmes, et à Radio-Canada pendant une vingtaine d’années, ainsi qu’à Télé-Québec. Cofondatrice du magazine féministe d’actualité La Vie en rose, elle a souvent été appelée à commenter l’actualité. Elle a contribué à une quinzaine de documentaires québécois et remporté plusieurs prix pour son travail au cinéma et en journalisme (dont le Prix René-Lévesque et le Prix Judith-Jasmin). Première directrice générale de Culture Montréal, elle continue de conseiller divers organismes culturels et communautaires. Elle est aussi présidente du CA des Amis de Kaléïdoscope, une publication dédiée au développement collectif dans tous ses états.
Titulaire d’un doctorat en sciences politiques de l’Université du Québec à Montréal, Marcelo Solervicens a une expertise de 30 ans dans le domaine de la communication pour des facettes diverses du développement collectif au niveau local et international. Ancien secrétaire général de l’Association mondiale de radiodiffuseurs communautaires (AMARC) de 2003 à 2013, il a été directeur général de Radio Centre-ville à Montréal et occupé responsabilités diverses ou rôle de conseil pour des organisations de coopération internationale, dont, CUSO, Oxfam-Québec, CEDAL. Il a collaboré dans plusieurs médias et centres de recherche, dont l’observatoire des Amériques, Radio Canada international, Pulso, entre autres. Il a également un profil de chercheur indépendant, analyste politique, journaliste, blogueur et consultant en développement de projets de communication. Marcelo est Directeur général par interim.