Au cours des 30 dernières années, les organisations et entreprises de l’économie sociale solidaire (ESS) ont grandi dans le monde entier. Parfois, elles sont assimilées au développement local, au développement communautaire, ou à l’économie solidaire ou économie sociale. Elles ont toutes des approches similaires, elles sont dirigées par la communauté ou la société civile. Dans de nombreux cas, elles se sont développées dans certains secteurs défavorisés de la société, qui ne sont d’aucun intérêt pour les acteurs de la mondialisation néolibérale impulsée par le marché; mais pas seulement. De nos jours, l’ESS existe aussi dans tous les secteurs de l’économie: la production, la finance, la distribution, l’échange, la consommation et la gouvernance. Un historique partiel des initiatives d’ESS est présenté dans le document intitulé « Économie sociale solidaire et concepts apparentés Les origines et les définitions : une perspective internationale », publié en 2014, ainsi que d’autres éléments de définition dans le document de la Vision Globale du RIPESS sur l’ESS.
À mesure que le secteur s’est développé et s’est structuré en réseaux, l’interaction avec les autorités publiques à tous les niveaux s’est développée. De nombreux gouvernements et autorités locales ont signé des contrats pour fournir des produits ou des services produits par l’ESS. Dans de nombreux pays, cela a évolué vers des politiques publiques à grande échelle en faveur de programmes tels que les garderies, la gestion des déchets, le logement coopératif, etc. La législation sur les coopératives existait déjà dans de nombreux pays. Cependant, dans la plupart des pays, l’accent était strictement mis sur les coopératives et n’incluait pas les organisations sans but lucratif. Les nouvelles lois embrassent une perspective beaucoup plus large, tout en incluant les coopératives.
Au fil du temps, cela a évolué vers la notion de co-construction des politiques publiques, incluant les législations. Par co-construction, nous entendons travailler de concert avec les ministères et les autres autorités publiques pour concevoir des politiques et des programmes. Au fil du temps, les gouvernements et les autorités locales ont réalisé que cette approche participative est le meilleur moyen de mettre en place des politiques efficaces qui auraient beaucoup plus de chances de réussir. Beaucoup d’actions de plaidoyer de la part des acteurs de l’ESS ont été et sont encore nécessaires pour atteindre ce résultat. Généralement, les organismes publics réalisent des consultation, souvent de manière très formelle, mais ils ne travaillent pas toujours dans une logique de co-construction participative.
Le RIPESS a adopté et promu cette approche participative dès sa création il y a 20 ans. Ce concept a été largement débattu lors du 3e Forum Mondialisation de la Solidarité, organisé à Dakar, au Sénégal, par le RIPESS en novembre 2005. Après les crises mondiales de 2008, de nombreux pays ont adopté des politiques et une législation reconnaissant l’ESS. Depuis lors, entre autres, RIPESS travaille à rendre les progrès visibles dans les différents continents, à l’échelle locale, nationale ou mondiale:
- Un partenariat entre Socioeco, RELIESS et RIPESS a permis de dresser une cartographie des politiques publiques existantes ou émergentes. Il s’agit d’un travail en cours qui géo-localise et décrit les politiques publiques qui soutiennent l’ESS dans le monde entier (en français, en anglais et en espagnol).
- Un article de 2016, « Reconnaissance juridique et politique de l’économie sociale solidaire (ESS). Un aperçu de l’état des lieux et éléments d’orientation », décrit différentes politiques.
- Plus récemment, en janvier 2018, un autre document a été publié, « Législation et politiques publiques en faveur de l’économie sociale et solidaire (ESS). Premiers pas & Éléments d’un guide pratique », présenté et partagé avec le groupe de travail inter-Agences de l’ONU sur l’ESS à des fins de plaidoyer.
Par ailleurs, pour renforcer son approche sur le sujet, le RIPESS a établi en 2016 une alliance avec le GSEF (Forum Mondial pour une Économie Sociale)- Le GSEF est une association internationale réunissant des gouvernements locaux (principalement des villes) et des acteurs de la société civile qui reconnaissent l’économie sociale comme un facteur clé du développement économique local, afin de promouvoir les politiques publiques d’ESS. Cela permet notamment d’assurer une approche oú tant le point de vue du gouvernement local (GSEF) que le point de vue des acteurs de l’ESS (RIPESS) est pris en compte. Cela a également conduit le RIPESS à établir un partenariat avec le FMDV (Fonds mondial pour le développement des villes). Ces partenariats sont importants pour la promotion des politiques publiques aux niveaux local et régional des gouvernements. Il est également essentiel pour localiser la mise en œuvre des Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies. La prochaine réunion importante aura lieu en octobre pour le Forum GSEF2018 de Bilbao.
Au cours des mois et pour les années à venir, le RIPESS et ses membres prévoient d’approfondir la compréhension du processus de co-construction des politiques publiques, afin de s’assurer que les réseaux de l’ESS profitent des expériences déjà existantes et contribuent à l’extension de ce processus. L’idée serait de réaliser des études de cas et, au fil du temps, décrivant en détail comment les acteurs de l’ESS préconisent et collaborent avec les acteurs publics pour la conception et la mise en œuvre réussies de politiques publiques. Par exemple, le cas du Mali, un pays qui a adopté en 2014 une politique publique nationale pour l’ESS, ou celui de la loi-cadre adoptée dans la province de Québec en 2012 pourraient être un bon point de départ. Nous organiserons également des wébinaires afin de présenter et de discuter en détail des différents exemples.
Yvon Poirier a une longue histoire dans les mouvements syndicaux et sociaux au Québec et au Canada. Entre autres, il était président pour la mise en place de la Corporation de développement économique communautaire (CDÉC) de Québec en 1994, et membre du Comité organisateur des Rencontres mondiales de développement local tenues à Sherbrooke (Québec) en 1998. De novembre 2003 à juillet 2013, il a coédité un bulletin électronique mensuel international sur le développement local durable publié en 4 langues. Il est membre du RCDÉC depuis 2003, d’abord comme membre individuel et depuis 2012 il représente la CDÉC de Québec.Il e